Werner était pendant lannée scolaire 2003/2004 responsable dune 4e classe (= CM1) avec français 1ère langue, tandis que Mireille enseignait lallemand à 8 élèves dune classe de CM2. Pour Werner, Mireille et Chantal (institutrice 2) de la classe de CM2), la motivation principale pour participer au projet Tele-Tandem était « la curiosité dapprendre sur une autre approche de lenseignement des langues ».Werner et Mireille ont fait connaissance lors du séminaire dintroduction à la méthode Tele-Tandem organisé par lOFAJ à Berlin en septembre 2003. Ils sy sont familiarisés avec le concept du projet et avec le matériel utilisé (écouteurs, caméras, etc.). Dès leur retour dans leur école respective, les deux enseignants ont fait en sorte de se procurer le matériel nécessaire. Très motivés, ils ont très vite pris lhabitude de se retrouver quotidiennement (« entre midi et 2 ») sur le courrier électronique et par téléphone pour faire des tests et organiser la suite du projet.
« En fait, nous étions dans la phase de préparation dans la même situation
que celle quallaient connaître plus tard nos élèves. » (citation Werner Schmoll).
« Werner était chaque jour avec nous dans la salle des professeurs, il est
devenu un membre de notre famille. » (citation Mireille Glunk).
Lors du séminaire de formation de Tübingen en octobre 2003 séminaire qualifié « dindispensable » - , Werner et Mireille en ont appris un peu plus sur lutilisation des nouvelles techniques de communication en relation avec la méthode Tandem. Le séminaire comportait par ailleurs un espace de discussion sur les problèmes techniques 3) , et il est apparu que ces moyens techniques ouvraient de nouvelles possibilités, telle lorganisation dune soirée dinformation des parents par vidéo-conférence. Cette meilleure connaissance des techniques a eu pour résultat positif de permettre dobtenir une subvention de la ville de Baden-Baden, alors que cette dernière était au départ sceptique à légard dun projet par trop original 4) , ainsi que la tenue de réunions par Internet avec Irmi Baumann 5) en télé-tutorat. Dès le mois de décembre 2003, le travail de Tele-Tandem a pu se mettre en place entre Baden-Baden et Guéret. Comme il na pas été possible détablir une liaison on-line satisfaisante entre les deux écoles, en raison de problèmes de réseaux, les rencontres se sont toujours faites du côté allemand sur lordinateur privé de Werner 6). La rencontre de Marly-le-Roi de mars 2004 sur le bilan intermédiaire du projet Tele-Tandem a permis à Werner et Mireille davoir un échange riche et motivant avec les autres participants au projet, eux aussi confrontés à des difficultés techniques 7).
Quatre rencontres Tele-Tandem au total ont eu lieu, au cours desquelles les correspondants ont tout dabord fait connaissance, puis se sont mutuellement appris du vocabulaire sur le thème du cirque 8). Même sil nétait pas toujours facile de se comprendre 9), le contact avec la webcam avait quelque chose de « magique », et la langue allemande est vite devenue pour les élèves français quelque chose de plus quune discipline scolaire. Les correspondants se sont rencontrés physiquement pour la première fois 10) en mai 2004. Des élèves français et allemands qui nétaient pas inscrits dans le projet Tele-Tandem ont été associés aux deux rencontres qui ont eu lieu sur place. Les élèves allemands accueillis à Guéret ont découvert la région de leur partenaire, et lécole à la française ; ils ont présenté à lécole de Guéret, en avant-première, une représentation de cirque encore inachevée (voir plus loin le récit de la seconde rencontre). Cette activité, ainsi que les connaissances acquises11) lors des premières rencontres Tele-Tandem, ont constitué le point de départ du travail en tandem franco-allemand qui sen est suivi. En dehors des activités en tandem encadrées (par groupes de 4 à 6), les élèves se sont spontanément retrouvés autour de jeux récréatifs lors desquels les élèves allemands ont appris à leurs camarades français intéressés deux jeux, lun de déplacement et lautre musical.
« Grâce à lanimation linguistique et aux jeux qui sont nés spontanément
entre les élèves, ce type déchange est allé largement au-delà des habituels
échanges à portée « touristique » (citation Werner Schmoll).
La deuxième rencontre a eu lieu à Baden-Baden en juin, sur le modèle dun programme déchange plus classique. Pendant deux jours, un travail en tandem a été réalisé à lécole de Baden-Baden : le spectacle de cirque (voir plus haut) a été complété en intégrant les élèves français et le vocabulaire « du cirque » appris en tandem à Guéret un vocabulaire dont les élèves se souvenaient fort bien, comme la souligné Mireille. Laboutissement de ce travail a pris la forme dune représentation donnée devant les parents allemands à la fin de la rencontre. Ces rencontres ont été facilitées par lorganisation de deux réunions franco-allemandes de parents par vidéoconférence 12).
Un des experts ayant demandé quelle avait été lincidence de la dimension « Tele-Tandem » sur la rencontre physique, Werner et Mireille ont répondu que le contact préalable avait permis aux participants de déjà se connaître dans une certaine mesure, de sorte que les inhibitions, habituelles lors dune première rencontre, avaient été moindres ; lintensité de la rencontre sen était trouvée renforcée. Par ailleurs, les parents sétaient montrés anxieux pendant la préparation du voyage, car il est inhabituel pour les enfants décole primaire de voyager à létranger. Les soirées franco-allemandes dinformation des parents mentionnées ci-dessus ont permis datténuer ces craintes, de même que la possibilité de mettre plus rapidement les parents en contact et denvoyer par mail des comptes rendus dactivité réguliers pendant la rencontre. Lutilisation des nouveaux médias a également permis de préparer un article de presse qui a été publié à Baden-Baden avant même le retour chez eux des correspondants allemands.
Werner et Mireille ont été dans ce projet aussi bien lélément moteur que les amplificateurs, propageant leur enthousiasme autour deux.
« Le moteur, cest nous et notre association.
Cest une histoire déquipe et de chimie » (Mireille Glunk)
Tous deux ont souligné à quel point il était important de poursuivre le projet. A Baden-Baden, le projet Tele-Tandem a eu pour conséquence de faire une publicité très bénéfique en faveur de lapprentissage du français à lécole (voir ci-dessous), en faisant lobjet darticles dans la presse et en constituant lun des thèmes dune conférence rassemblant les directeurs décole de Baden-Baden 13). Werner a suggéré que ce type de travail linguistique transnational soit intégré dans la formation des maîtres, estimant que cest justement dans les régions qui bénéficient dune proximité géographique, cest-à-dire dans les régions frontalières, que les distances sont souvent les plus notables.
En ce qui concerne leffet produit sur les élèves, il est indiqué que tant du côté allemand que du côté français, les élèves ont été « enthousiastes et très motivés » ; ils continuent à rester en contact sur le plan privé. Mireille a souligné que le plaisir et la joie que procurait le projet Tele-Tandem résidaient essentiellement dans le fait que dune part, les participants acquéraient une conscience nouvelle de la langue du partenaire, mais aussi de leur propre langue maternelle, et que, dautre part, la méthode mettait en évidence la part de responsabilité personnelle quimplique lapprentissage, tant pour celui qui apprend que pour celui qui enseigne à lautre. Ceci, a-t-elle poursuivi, est valable aussi bien pour les élèves que pour les enseignants, et ne concerne pas seulement les aspects techniques, mais englobe également le domaine interculturel. Par exemple, pour les quatre collègues allemands qui ont accompagné le voyage à Guéret, le fait de participer au quotidien dune école française a constitué une expérience intéressante. Werner, quant à lui, estime que la spécificité du programme Tele-Tandem est de permettre que lenseignement de la langue étrangère à lécole primaire se fasse au plus près de la réalité. Les enfants comprennent que « de lautre côté, et au même moment, un enfant français ou un enfant allemand existe comme lui, qui mange, dort et va à lécole de la même façon ». La seule dimension « artificielle » dans cette situation est la phase initiale de prise de contact assistée par ordinateur entre les élèves.
Les liens damitié de longue date qui unissent Werner et le directeur de lécole française 14), liens qui sont à lorigine de la décision de participer au projet, ont eu une incidence positive sur la réalisation du projet et a favorisé un bon esprit de coopération entre Werner, Mireille et Chantal. Sur le plan institutionnel, la ville de Guéret, qui avait montré quelque scepticisme pendant les réunions préparatoires au projet Tele-Tandem, a par la suite apporté son soutien, en faisant en sorte par exemple que lADSL soit installée à temps pour la première réunion dans lécole de Mireille. LInspection Académique quant à elle a chaque fois donné son autorisation pour linvitation de représentants de la Presse et létablissement de rapports sur les rencontres au bénéfice de lOFAJ, elle na en revanche jamais demandé de compte rendu pour sa part, ainsi que le souligne Mireille. Du côté allemand, « la faisabilité dun tel projet a été rendue publique ». Quelques collègues de Werner ont également manifesté leur intérêt pour le Tele-Tandem. Werner fera prochainement un exposé sur le projet dans le cadre dun séminaire de formation continue denseignants à Gaggenau. En 2004/2005, il a la charge dune classe de CE 1 (2. Klasse) qui a commencé le français en 1ère langue en 2003/2004 15). Beaucoup de ses anciens élèves de « Tele-Tandem », qui sont entrés au collège cette année 16) continueront lapprentissage du français. Werner va continuer le projet Tele-Tandem cette année encore et espère pouvoir organiser avec Mireille un échange de deux semaines. Werner pense quil est important que des régions non frontalières aient également la possibilité de réaliser des échanges linguistiques, et va donc poursuivre son appariement avec lécole Jacques Prévert 17).
Parmi les anciens élèves de Mireille, germanistes ou anglicistes, qui ont participé aux rencontres (15 élèves au total), beaucoup ont rejoint au collège une classe bilangue 18), cest-à-dire quils apprennent simultanément langlais et lallemand.